Diary Sow est une étudiante brillante certes, mais c’est avant tout une jeune femme de son époque, avec un développement affectif et relationnel correspondant aux normes de son âge.
Or, comment aller bien dans un monde malade ? La période que nous vivons a un impact sur le moral de tous. Alors comprenons bien qu’une personne surdouée, possédant un rythme de développement intellectuel très supérieur à la moyenne, puisse ne pas vivre le monde de la même manière que chacun et que sa sensibilité puisse être différente.
En tant que maman de filles toujours étudiantes et du même âge que Diary, je sais que pour les parents, il s’agit dans certains cas d’être juste présents et d’accepter d’avoir tort. « Tu n’as pas à porter le poids du monde sur tes épaules » ai-je envie de dire à cette jeune compatriote.
Si la disparition pour quelques jours de Diary Sow a mis tout le Sénégal en émoi, je voudrais aussi qu’elle sache que cette émotion ne doit pas être une pression nationale sur ses épaules, mais un sentiment fraternel de soutien et de fierté, de la part d’un peuple pour qui l’éducation est le seul vecteur d’émancipation et d’ascension sociale.
Célèbre au pays comme l’incarnation de l’excellence et de la réussite scolaire, Diary Sow a remporté deux fois le prix de la « meilleure élève du Sénégal » et publié un roman en 2020, « Sous le visage d’un ange », une histoire d’amour où il est déjà question d’une femme-enfant à la soif de vivre débordante et des dissensions familiales qui pèsent…
Elle est arrivée en France il y a un an et demi, après avoir décroché une bourse d’excellence. Décrite comme une élève ponctuelle, très sérieuse, surdouée, qui croule sous les cahiers, peut-être n’a t-elle plus supporté l’image et les clichés que l’on véhicule sur elle et qui ne sont pas la vraie vie ? On la voit comme une bête de foire, alors que dans la vraie vie c’est différent. Sûrement est-elle une personnalité hors norme et équilibrée. Car il faut de la ressource pour faire ce qu’elle a fait, c’est à dire, un pas de côté, quand la pression est trop lourde. Quand le doute s’installe et que l’horizon s’assombrit, quand on a besoin d’une pause, combien de jeunes à bout de souffle ont commis l’irréparable ? Signe supplémentaire de son intelligence, l’étudiante sénégalaise n’est pas prête à sacrifier tout ce qu’elle a pour assurer sa réussite.
Heureusement, l’étudiante du prestigieux lycée parisien Louis-le-Grand a depuis le décès de son père en avril dernier, un « parrain » aimant et bienveillant, en la personne de Serigne Mbaye Thiam, le ministre sénégalais de l’Eau et de l’Assainissement et ancien ministre de l’Education nationale.
Grâce à lui et au lien de confiance qu’il entretien avec elle, nous savons qu’elle va bien : « Tonton, Je te prierais de rassurer les gens qui me cherchent. Je vais bien, je suis en sécurité. Sache que je suis terriblement, profondément désolée ».
Je suis personnellement impressionnée par la personne de Diary Sow. Magnifiquement jolie, intelligente, romanesque et probablement amoureuse, j’espère que ce « répit salutaire », ce passage par l’acte qui permet de se réorganiser, lui permettra, si c’est son envie, de faire partie de cette élite républicaine et de conquérir le monde malgré la cruauté de l’époque et l’absence de ses proches auprès d’elle.
Dans tous les cas, ne mettons pas Diary Sow dans une boite. Laissons-la respirer. Et si le cœur lui en dit, elle ne manque pas de références. Quoi qu’elle fasse, respectons ses envies. Littéraire, scientifique, artistique, économique, politique ou sociale… Quoi qu’elle décide, c’est de sa vie qu’il s’agit, alors, cessons d’attendre d’elle qu’elle soit le « Mozart » du 21ième siècle.
Mais si elle décidait de conquérir l’Everest, je sais qu’elle peut compter dans son ascension vers les sommets sur tous les sénégalais heureux qu’elle soit bien entourée et en bonne santé, et par le soutien sans faille du premier d’entre eux, le président Macky Sall lui-même, qui fut très attentif à sa disparition et a donné des instructions pour la retrouver.
Oumou Wane