BALISES : La Casamance et le scénario sri-lankais. Par Yoro Dia !

Depuis années, j’écris que l’Armée a gagné la guerre, mais ce sont les politiques qui sont incapables de gagner la paix. C’est la division du travail. L’Armée gagne la guerre et crée les conditions et un rapport de force favorables, afin que les politiques puissent gagner la paix.

C’est pourquoi Clemenceau disait que «la guerre est une affaire trop sérieuse pour être laissée entre les mains des militaires». Aux Etats-Unis, lors de la guerre de sécession, le Général Grant a gagné la guerre et Lincoln a gagné la paix en n’humiliant pas les rebelles du Sud. Pendant longtemps, j’ai pensé que pour la Casamance on s’acheminait vers le modèle de la sortie de la guerre de sécession aux Etats-Unis, mais depuis quelques mois on va tout droit vers le modèle de sortie de guerre du Sri Lanka. Au Sri Lanka, l’Armée a infligé une défaite totale aux rebelles et de fait, l’autorité de l’Etat a été restaurée sur toute l’île. Donc, la paix a été la conséquence de la défaite totale de la rébellion. Ce qui différencie le cas Sri lankais du cas colombien, où l’Etat a toujours naïvement compté sur le dépérissement de la rébellion après de très longues accalmies.
L’Etat du Sénégal, en optant d’attendre l’unification ou la réunification du Mfdc pour avoir un interlocuteur unique avec qui négocier, risque d’attendre cent ans, car cette réunification et un interlocuteur unique sont impossibles pour des raisons historiques et politiques. Attendre la réunification du Mdfc pour négocier et avoir la paix, nous menait tout droit vers le schéma des Farc colombiens, qui ont dégénéré dans le banditisme et le trafic de drogue. Ainsi, l’avenir du Mfdc serait le Présent des Farc colombiens, dont les trafics sont la finalité.
L’opération en cours de l’Armée pour nettoyer les dernières bases du Mfdc confirme le schéma de sortie de crise sri lankais, car l’Armée, après avoir gagné la guerre, est aussi en train de gagner la paix en restaurant de fait l’autorité de l’Etat partout. Sur ce plan, les populations du Balantacounda, qui ont décidé de rentrer sous la protection de l’Armée, sont en avance sur les autorités, parce qu’elles ont compris que la guerre est finie et qu’il ne reste que la violence résiduelle.
Si les populations retrouvent leurs villages abandonnés, il est du devoir de l’Armée de leur assurer la sécurité. Avec le retour des populations, l’Armée est obligée d’être là et si l’Armée assure la sécurité, l’instituteur sera là et peut-être l’infirmier. Le soldat et l’instituteur sont les piliers et les meilleurs représentants de la République et de l’Etat. Les opérations en cours vont hâter les négociations de paix, à la seule condition que l’Etat aille jusqu’au bout. Les négociations seront d’autant plus faciles si le Mfdc constate que l’autorité de l’Etat a été restaurée sur toute la Casamance et qu’elle n’a plus de zone de repli ni en Gambie ni en Guinée-Bissau.
La bérézina du Mfdc ne doit pas nous dispenser de notre devoir de magnanimité, car comme disait Sir Winston Churchill, «la magnanimité envers un adversaire vaincu est non seulement morale mais est un bon investissement pour l’avenir». La magnanimité envers le Mfdc est le meilleur investissement pour l’avenir car, après la guerre, elle permettra de gagner la paix avec ce qui reste de combattants au Mfdc sur le terrain, pas les rentiers de la guerre de l’aile extérieure, confortablement installés en Europe, qui nous bombardent de communiqués devenus des armes de distraction massive tellement ils sont en déphasage avec la réalité du terrain. Le Mfdc a apporté une mauvaise réponse à une vraie question. La paix consistera à apporter à la question la bonne réponse, à savoir que le Sénégal est indivisible mais c’est une Nation plurielle.

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