Les émeutes meurtrières que nous venons de vivre nous interrogent profondément sur nous-mêmes et sur la capacité de notre modèle social à résister aux attaques extérieures comme celle de la pandémie de la Covid-19 et aux provocations internes semblables à cette propagation de haine virale des réseaux sociaux et au rôle incendiaire d’une partie de la classe politique contre les intérêts de notre pays.
Le temps probablement donnera des éclaircissements sur les responsabilités de chacun dans cette crise, mais pour l’heure, pourquoi ne pas transformer ce cataclysme inédit en opportunité de changement pour nous réinventer ?
Soulignons ici que le président Macky Sall, une fois de plus, n’a pu compter sur aucun conseiller ni modérateur pour rappeler la nation au calme et la raison. Dans son discours « refondateur » du 8 mars, qui fera date, il a su trouver les arguments et les mots qu’il fallait pour rappeler à chacun les valeurs de paix de notre république et les vertus de l’exception démocratique sénégalaise.
Afin de mieux décrypter le message que le peuple souverain lui a adressé par la rue, notre président ne cesse de consulter et c’est un défilé incessant au Palais, des politiques, des religieux mais aussi la société civile… qui devrait aboutir à des mesures fortes allant pourquoi pas jusqu’au chamboulement de l’équipe gouvernementale. Première annonce rapportée ce jour par Dakaractu : Le Président Sall va créer un fonds d’urgence pour les jeunes basé à la Présidence, afin d’en contrôler lui-même la bonne marche.
Du retard a été pris certes, mais il n’est jamais trop tard pour entendre les jeunes autrement que par les émeutes, en remettant en cause le statu quo, en écoutant vraiment les attentes des jeunes, en se rassemblant pour inventer un nouveau contrat social qui donne la priorité à la lutte contre le chômage des jeunes et à l’égalité des chances.
Nous avons besoin de solutions qui reflètent le monde moderne et d’une action visionnaire pour faire de l’emploi des jeunes une urgence politique. Politiquement, il s’agit de faire résolument le choix de la jeunesse, comme investissement d’avenir et gage de cohésion sociale.
Quand la jeunesse n’a plus d’espoir et que les diplômes n’aident plus à rentrer sur le marché du travail, c’est qu’il n’y a plus d’horizon pour des jeunes qui divorcent de la politique.
C’est pourquoi nous devons mobiliser toutes nos ressources pour changer de trajectoire et miser sur des ressorts neufs pour rebondir. La relance du secteur informel est une urgence absolue, tellement il est stratégique dans notre économie. L’accompagnement des jeunes est prioritaire, par la voie de l’apprentissage notamment dont il faut améliorer l’image auprès des jeunes. Ce n’est pas sérieux de ne pas recruter un apprenti. Nous devons davantage encourager le secteur privé avec des aides à l’embauche de jeunes et inciter les chefs d’entreprise et entrepreneurs qui ne manquent pas au Sénégal à prendre en charge des jeunes, pourquoi pas en créant une plateforme « 1 jeune, 1 patron » !
Quels que soient les moyens, nous devons prendre en compte ces émeutes urbaines et ces sentiments d’injustice, pour entamer une révolution et aboutir à une véritable transformation.
À défaut, cette jeunesse qui s’est trouvée en première ligne, poussée par son besoin d’absolu, son désir de changement et son courage, pourrait encore commettre des actes graves car se sentant exclue de la société.
De son côté, le président Macky Sall saisira à n’en pas douter l’opportunité de cette crise pour faire prendre à son régime un nouveau tournant. L’affaire Sonko-Adji Sarr, aussi dramatique soit-elle, vient de lui donner la possibilité de se montrer sous un nouveau jour, plus à l’écoute de son peuple et avec toutes les cartes en main pour transformer notre société.
Car ne l’oublions pas, il ne suffit pas d’être antisystème pour guider notre pays vers son destin. Jusqu’aujourd’hui, grâce au travail acharné de nos gouvernants, de longue date, sûrement pas assez vers les jeunes d’ailleurs, nous nous portons mieux, malgré tout, que la plupart des pays alentour et nous voir un genou à terre ne serait pas pour déplaire à tout le monde.
Vive la République !
Vive le Sénégal !
Oumou Wane